Fondée en 1855, la municipalité de Morin-Heights célèbre 165 ans d’une riche histoire. Initialement territoire forestier, les premiers colons, agriculteurs et travailleurs forestiers ont, au fil du temps, transformé notre coin de pays pour un faire un paradis artistique et de sports de plein-air. Le récit que vous vous apprêtez à lire est en grande partie tiré de l’oeuvre "Une brève histoire de Morin Heights". Mme Sandra Stock, fondatrice de l’Association Historique de Morin-Heights, a écrit cet article en 2005 pour le 150ième anniversaire de Morin-Heights.

L’origine du nom « Morin-Heights »

Notre municipalité doit son nom à Augustin-Norbert Morin qui a délimité une grande partie de la région dans les années 1830 à 1840. Il a été ministre et par la suite co-premier ministre de l’Union du Haut et Bas-Canada. Le canton Morin fut créé en 1852. Il englobait les actuelles municipalités de Ste-Adèle, Val-David, Val-Morin, une partie de Ste-Agathe et Morin-Heights. Le canton Morin a été scindé en deux en 1855 et sa partie sud est devenue la «Municipalité de la partie Sud du Canton de Morin». En 1950, on changeât ce nom un peu compliqué pour celui de « Municipalité de Morin-Heights ». Morin Flats était un des quatre hameaux qui formaient la municipalité à son origine, les trois autres étant Christieville, Britonville et Leopold/Pleasant Valley. Cette première étant considérée le noyau principal, on changent son nom pour celui de Morin-Heights en 1911.

 

 

Les premiers colons

Jusqu’à la première moitié du XIXe siècle, seuls quelques chasseurs autochtones, des Mohawk de passage pour la plupart, habitaient ici de manière saisonnière. Bien que quelques colons se soient installés vers 1840 dans la région de Mille Isle, ce n’est qu’en 1850 qu’Augustin-Norbert Morin fit arpenter la région. Le tout premier colon à s’établir dans ce qu’on appellera éventuellement le canton Morin fut Thomas Seale, natif de Connaught en Irlande. En 1848 Il commença par déboiser un grand lot de terre autour du lac Écho afin de cultiver la terre. Peu à peu, quelques familles de pionniers initialement installées à Gore, à Mille Îles et aux alentours choisirent de migrer vers Morin qui recevait simultanément d’autres immigrants venus directement d’Irlande. Parmi les nouveaux arrivants des années 1850 mentionnons George Hamilton, lequel sera notre premier maire, Lawson Kennedy, Archibald Doherty, John Reilly, William Watchorn and John Newton. Le “Township” de Morin fut incorporé en 1855. Il ne fallut que quelques années pour qu’une nouvelle communauté de pionniers se mette au travail pour défricher le territoire et bâtir maisons, églises, moulins et écoles. L’arrivée continuelle d’immigrants irlandais et écossais était accompagnée de nouveaux arrivants francophones venant pour la plupart de Saint-Eustache, Saint-Jérôme et Saint-Sauveur-des-Monts. Parmi ceux-ci, notons les familles Corbeil, Bélisle, Guénette, Piché et Groulx. Le tout premier recensement officiel fut tenu en février 1861 par Charles Sinclair, un jeune agriculteur, qui a dû parcourir le district en raquettes. Il dénombra 350 résidents, d’âge moyen de 19 ans et comptant très peu de personnes de plus de soixante ans. Dans son rapport, Sinclair mentionne que le territoire était «vallonné et accidenté » et que plusieurs des habitants vivaient éloignés les uns des autres, dans une quasi isolation. Les premiers colons étaient coupés du reste du monde et de nombreuses épreuves et privations rendaient leur vie très difficile. À leurs débuts, bien qu’habitant un territoire au sol rocailleux, ils durent abattre les arbres leur permettant de créer l’espace nécessaire à la culture de subsistance (légumes, fruits, blé, etc.) et à bâtir leur maison et bâtiments de ferme. Heureusement, ces premiers habitants apprirent à se débrouiller en abattant les arbres de bois franc qu’ils brûlaient pour faire de la potache, leur unique ressource de revenus. Ils devaient aller à pied à Montréal – une pénible randonnée de 3 jours – qui leur rapportait 5 dollars, une coquette somme à l’époque. La potache était utilisée pour fabriquer du savon et des fertilisants. Mentionnons aussi que la chasse et la pêche leur procurait de quoi faire de bons repas. Nécessité faisant loi, quelques moulins à grains furent construits à cette époque. Plusieurs furent par la suite transformés en moulins à bois. Les premiers magasins généraux et forges virent le jour aussi à ce moment. Un premier pont fut érigé à Christieville sur la rivière à Simon vers 1850 et le réseau de sentiers fit lentement place à des routes carrossables.

Le bureau de poste

Au fur et à mesure du développement du canton Morin, quatre bureaux de poste furent ouverts à Britonville (1857), à Morin Flats (1875), à Léopold (1884) et à Christieville (1900). Britonville, située près du lac Breton, entre Morin et Saint-Sauveur et étant alors le hameau le plus populeux du territoire s’étendant de la Côte Saint-Gabriel jusqu’au lac Écho, on y installa le premier bureau de poste. Un deuxième fut ouvert à Morin Flats en raison de l’accroissement de la population. Un troisième bureau de poste fut ouvert à Léopold, petit hameau situé près du lac Anne, au bout du chemin Kirkpatrick. Dernier mais non le moindre, Christieville eut finalement droit à son bureau de poste en raison de l’activité commerciale et industrielle de l’endroit grâce à son moulin, son magasin général, sa forge et surtout sa gare, située à l'endroit où le chemin Côte Saint-Gabriel traverse l’actuelle route 364. Mais pourquoi quatre bureaux de poste vous demanderez vous peut-être? Il faut se rappeler qu’au milieu du XXe siècle l’unique moyen de transport pour se déplacer d’un endroit à l’autre, hormis de circuler à pieds, était assuré par des chevaux. C’est d’ailleurs pour cette raison que chaque village avait sa petite école tout proche.

Le chemin de fer

L’arrivée du chemin de fer du Canadien National à Morin en 1895 mit fin à l’isolement de notre coin de pays. Elle permit aux scieries locales, déjà florissantes, de croître et de créer plus d’emplois locaux, particulièrement au cours des années difficiles de la Grande Dépression des années 1930. Les deux principales scieries à l’époque étaient J.E. Seale & Son et la scierie Guénette et sa fabrique de portes et fenêtres. Dans les Laurentides, comme la saison fertile est très courte et que le sol est rocailleux, l’agriculture n’a jamais été davantage qu’une agriculture de subsistance. Les fermiers ont pour la plupart d’entre eux travaillé dans les camps de bûcherons en hiver et les moulins à scie ont alors fortement contribué à l’économie locale. Le chemin de fer a permis d’acheminer plus rapidement les ressources naturelles de la forêt vers les marchés d’une région à l’autre du pays et les entreprises telles que le CN ont aussi vu, à leur grand étonnement, naître une nouvelle industrie, celle du transport de passagers, vacanciers et touristes, vers des régions nouvellement accessibles. Dès 1900, les nouveaux « estivants » virent passer leur vacances d’été ici et plus tard, à partir des années ’20, les visiteurs purent prendre le train été comme hiver ce qui donnât naissance à l’industrie du ski. Rappelons au passage qu’à l’époque, il n’y avait que peu de routes carrossables au nord de Montréal et encore moins en hiver. Peu à peu, des citadins en mal de nature et de paix commencèrent à s’installer autour du lac Écho pour y faire construire leur maison d’été. Dans le village de Morin-Heights, plusieurs villageois créèrent de nouvelles maisons de chambres afin d’accueillir les skieurs qui débarquaient en grand nombre pour un séjour de weekend ou d’une semaine.

Les skieurs arrivent « à fond de train »

Dans les années 1930, plusieurs nouveaux hôtels voient le jour : Le Rockcliff, le Bellevue, l’Alpino, et le Chatelet. Plusieurs d’entre eux appartenaient à des familles venues d’Allemagne et de Suisse, lesquelles avaient une grande expérience du secteur hôtelier. Parmi ces précurseurs notons la famille Basler qui innovât par l’installation du premier remonte-pente de notre coin de pays. Au cours des années 1930 et 1940, la popularité grandissante du ski emmenait les trains bondés de touristes à la gare de Morin-Heights tous les weekends. L’Arrivée du train était un évènement d’importance pour toute la population. Les traineaux et carrioles conduits par les villageois emmenaient les skieurs aux hôtels et maisons de pensions du village. Cette belle époque a pris fin le 27 mai 1962 avec le départ du dernier train et le démantèlement de la voie ferrée. Heureusement et au bonheur des skieurs, randonneurs, joggers et cyclistes, le chemin de fer a été remplacé par le Corridor Aérobique, piste damée et bien entretenue sur 58km, partant de l’ancienne gare de Morin-Heights et menant vers l’ouest jusqu’à Montcalm. Le bâtiment de l’ancienne gare marque le point de départ du corridor. Depuis près d’un siècle, de nombreuses pistes de ski de fond ont été tracées et aménagées au fil des ans et Morin-Heights peut s’enorgueillir d’avoir produit de nombreux champions de ces deux sports. Preuve en est de la dénomination officielle de « capitale du ski de fond », fièrement affichée aux panneaux de bienvenue aux 4 coins de la ville. Côté ski alpin, la station « Sommet Morin-Heights » ouverte en 1981, a ajouté un fleuron au statut de destination touristique de notre municipalité.

Mutations et croissance économique

Jusqu’au milieu du XXième siècle, l’économie de Morin-Heights est restée essentiellement basée sur l’industrie forestière et la production ovine et laitière. Par la suite, avec l'amélioration du réseau routier et l’arrivée de l’ère des communications, Morin-Heights devint moins rurale, moins isolée et plus facilement accessible au commun des mortels. La construction en 1952 de la base Radar Stat par les Forces Armées Canadienne au lac Saint-Denis inaugurait cette nouvelle ère. La population grandissante rend nécessaire la construction d’une nouvelle école cette même année, laquelle remplaçât les petites écoles disséminées ça et là sur le territoire et de ce fait emmenât l’arrivée des premiers bus scolaires. Auparavant, le transport scolaire hivernal était assuré par les taxi-bus Bombardier qui faisaient également la distribution du courrier. Bien qu’assez bruyant, c’était un nouveau mode de transport passionnant qui laissait cependant un certain inconfort pour les passagers qui y prenaient place. Rapidement, cette nouvelle école ouvrit des classes de niveau secondaire jusqu’à la 12ième année. En 1981 la croissance démographique rendit nécessaire le transfert des classes du niveau secondaire vers Lachute et seuls restèrent les élèves du niveau primaire. De nombreux nouveaux résidents s’installent à Morin-Heights dans les années 1960 et 1970, notamment de jeunes américains opposés à la guerre du Vietnam. Le coeur du village devint peu à peu plus cosmopolite et vit le milieu culturel se développer par les arts et tout particulièrement par la musique. Il n’est pas étonnant que notre municipalité ait, en raison de son air pur et de la beauté naturelle de nos paysages, attiré tant d’artistes ici. Certains d’entre eux sont devenus célèbres partout au Canada, notamment Edwin Holgate, Helmut Gransow et Peter Whalley. Et n’oublions pas les nombreux artistes-peintres et musiciens amateurs « doués » qui ont toujours été très nombreux chez nous. Encore aujourd’hui, Morin-Heights peut poursuit la tradition avec quelques associations culturelles, entre autres, Arts Morin-Heights en peinture, poterie et sculpture et en musique avec la chorale Joyful Noise Choir et les nombreux chanteurs, compositeurs et interprètes, solos ou groupes qui se produisent localement. À compter des années 1980, notre économie s’est diversifiée avec l’arrivée de nouvelles entreprises dans les domaines de la construction, de fabrication, de commerces de détail et tutti quanti. La protection de l’environnement et des sites et bâtiments historiques a toujours été une priorité pour les citoyens de Morin-Heights. Nous somme fiers de vivre dans un environnement bilingue où « L’harmoinie, c’est dans notre nature ». Cette conscience environnementale continue de croître à mesure que nous nous tournons vers l’avenir. Nous sommes fiers de notre patrimoine bilingue et de vivre dans une communauté en tout respect des uns avec les autres. La devise de notre municipalité, "L'harmonie est dans notre nature" n’est pas un vain mot.